mardi 29 septembre 2009

Un week end au palais des mille et une nuits...

Parce que notre dernier week end (Amritsar, plus de 20h de bus pour une nuit sur place) n'a pas été des plus reposants, nous avons décidé cette fois d'opter pour un voyage qui, dans un catalogue, figurerait plutôt dans la catégorie "luxe, calme et volupté"...
Comme si nous venions de gagner au loto, nous avons donc posé notre doigt sur la carte et opté pour un ancien palais situé à deux petites heures de Delhi: Neemrana fort palace, construit en 1464 sur les collines du Rajasthan.
La route pour s'y rendre est déjà un régal: éléphants, chameaux et paysages somptueux ponctuent notre chemin.
Arrivées au fort, nous ne regrettons pas notre choix. C'est tout simplement splendide. Le palace est immense, et regorge de petites terrasses sur lesquelles on peut apprécier une solitude inexistante à Delhi. On se croirait dans un village: petites ruelles escarpées, escaliers débouchant sur des jardins, patios cachés entre deux murs, vue à couper le souffle sur les collines environnantes... La visite du fort peut occuper toute une après midi!
Rendez-vous est rapidement pris avec Dame Farniente, qui nous tient agréablement compagnie pendant deux jours. Comment ne pas succomber aux charmes d'un bon verre de vin (qui nous avait cruellement manqué) sur la terrasse privée qu'occupe notre chambre, ou à ceux d'une nocturne au bord de la piscine, tandis qu'au loin s'élève la mélodie d'un chant traditionnel?
Pas convaincus? Je vous laisse déguster ces quelques images...
LUXE




Oups... deux fois la même photo (erreur de manip')




CALME



Et si on attendait simplement que le temps passe?



VOLUPTE

mercredi 23 septembre 2009

Kutub Minar ou Comment faire du tourisme en estafette ou Les aventures de Martine à la campagne

La journée avait commencé plutôt normalement. 13h, rendez-vous avec Logaine sur le siège matelassé d’un rickshaw, direction Kutub Minar (qui s’écrit également Kûtb Minar), au sud de Delhi.
Mais qu’est ce que Kutub Minar ? Eh bien, c’est une tour. Une tour ? Oui, mais pas n’importe laquelle. C’est la « tour de la victoire ». Erigée au XIIème siècle par un dénommé Qutb Ud-Dîn Aibak, qui fût le premier dirigeant musulman de Delhi. 72,5 m de hauteur pour 14,3 m de diamètre. Un mélange de grès rouge et de marbre blanc. Des inscriptions calligraphiques reprenant les vers du Coran. Impressionnante, en somme.


Dans le complexe qui abrite Kutub Minar, on trouve également les ruines de la première mosquée construite en Inde, et qui porte le doux nom de Qwwat ul-islâm.
Ainsi que le premier tombeau, construit en 1235 (qui abrite le corps d’un certain Iltutmish) : à l’époque, les corps subissaient encore exclusivement le rituel de la crémation.




Pendant une ou deux heures, Logaine et moi avons promené nos tongs et nos objectifs dans ce lieu prestigieux et plein d’histoire…. puis l’aventure a commencé !Le matin même, Logaine avait trouvé sur Internet une idée de balade ‘en dehors des sentiers touristiques’ : il semblerait qu’à quelques mètres du complexe de Kutub Minar soit caché un petit chemin traversant un marché floral et menant vers l’entrée (discrète) d’un parc inconnu du grand public… Il ne nous en faut pas plus pour exciter notre curiosité et nous voilà parties à la recherche du marché magique. A force de mimer avec les mains le dessin d’une fleur, nous finissons par trouver un interlocuteur qui parvient à nous renseigner sur le chemin à prendre pour le marché floral. Bon. Si vous avez en tête les images et les odeurs du marché aux fleurs et aux oiseaux de l’Ile Saint Louis, oubliez tout de suite. Il s’agit ici d’un chemin en terre battue, le long duquel s’étalent charrettes et tissus colorés : Dans les huttes de fortune sont installés hommes, femmes et enfants, tous assis en cercles ou en rangs et puisant à pleines mains dans des sacs remplis de pétales jaunes et roses. Certains dorment pendant que d’autres brassent. Aucun touriste en vue, aucun acheteur non plus. Ce qui se vend ici, ce ne sont pas les fleurs que l’on s’offre mais celles que l’on donne en offrande aux dieux lors des pujas. Nous avançons sereines sur ce petit chemin perdu quelque part dans la ville, déposant au vol quelques images dans nos yeux et cherchant du regard le fameux sentier vers le parc secret…

Au bout de quelques minutes, O rage O déception, le chemin débouche sur une voie rapide. Alors que, dépitées, nous nous apprêtons à faire demi-tour, nous apercevons sur le bas côté un vendeur de boissons fraîches : et derrière lui, une barrière, un début de sentier mal débroussaillé. C’est là ! On pousse la barrière et après quelques pas, nous débarquons dans l’immensité d’un parc comme laissé à l’abandon. Quelques hommes trainent ici et là, des enfants jouent avec un ballon, le silence des arbres règne… le voilà, le Paradis Perdu de Delhi ! Le parc est ombragé et même vallonné. Nous escaladons une butte d’herbe sauvage et découvrons, assises sur un rocher fortuitement posé là, une superbe vue sur la ville. Delhi s’étale sous nos pieds et elle ne sait même pas que nous la regardons … Joli petit moment. Mais comme une trouvaille ne suffit pas, nous nous mettons maintenant en tête de trouver les anciens bains dans lesquels nageaient joyeusement les familles hindoues du dimanche, il y a quelques décennies de cela… Encore une info que Logaine a trouvé sur son fameux site Internet. On commence à s’enfoncer plus avant dans le parc et c’est là qu’on découvre qu’il est vraiment immense. On se croirait en campagne un jour férié et mes forêts bretonnes me remontent aux narines… Sur notre route, nous croisons les ruines d’une ancienne mosquée (presque aussi jolie que celle de Kutub Minar, mais il n’y a personne pour la photographier, celle là), trois jeunes hommes qui veulent nous aider mais qui ne parlent pas anglais, une famille de cochons et deux vaches errantes …. Et puis finalement, alors qu’à ce moment du récit vous vous attendez (et moi aussi) à ce que l’on tombe sur une source d’eau transparente ou sur un tigre en liberté, nous tombons sur une estafette de police, avec à ses côtés les petits bonshommes qui travaillent dedans. En désespoir de cause, nous leur demandons s’ils savent où sont cachés ces fameux bains. Je mime un nageur en mouvement tandis que Logaine mime un plongeon… on joue à Pictionnary pendant quelques minutes, puis un éclair de compréhension passe enfin dans leurs yeux. Oui, ils savent où c’est ! « Je finis mon sandwich et on vous emmène », nous explique le premier. OK, on n’est pas pressées, nous. Le sandwich terminé, on nous fait grimper à l’arrière de l’estafette. « C’est la première fois ! » je leur dis, toute joyeuse. « Heureusement », me rétorque le petit brun à l’avant. Oups. On roule comme ça sur des chemins brinquebalants, secouées à chaque virage mais ayant l’impression de vivre pendant quelques minutes dans un épisode de série policière (oui, il m’en faut peu). J’espère même en secret qu’ils vont se décider à mettre la sirène…
Arrivées aux pieds des fameux bains, nos petits policiers nous expliquent que le coin n’est jamais visité par des touristes et que ce ne serait pas bien de leur part de nous abandonner là. Donc ils vont nous attendre, et ils ajoutent que surtout, on peut prendre notre temps, ils ont tout le leur. Youpi. Une garde policière pour nous toutes seules…. Ce n’est plus la série policière qui se joue dans ma tête maintenant, c’est BodyGuard.
On commence enfin la visite des bains, et là, on ne regrette pas d’avoir tant cherché. Ça vaut vraiment le détour… Juste à côté, des escaliers nous permettent d’accéder à une terrasse qui surplombe le parc, et la ville encore une fois. Un des policemen nous explique que le site a enfin attiré l’attention des autorités et qu’il a été déclaré zone protégée depuis peu. Des travaux de réhabilitation vont être mis en place. Ouf. Parce que franchement, c’est dommage de cacher ça aux yeux de tous.


Chemin du retour, le conducteur nous demande ce que nous comptons faire après. Ben.. en fait… on irait voir ce qu’il y a de l’autre côté de la route qui longe le parc… on a vu la tête d’un énorme Bouddha tout à l’heure et ça nous intrigue… Il nous arrête tout de suite : c’est pas Bouddha, c’est Jain. Mais il accepte de nous y emmener !
Nous voilà donc sur la grande route, toujours à l’arrière de notre estafette. Et nous débarquons en grandes pompes devant le temple, sous des dizaines de paires d’yeux intrigués. A la descente de l’estafette, nous remercions chaleureusement nos guides d’un jour, nous nous serrons la main et nous promettons les larmes aux yeux de nous revoir bientôt (la toute dernière partie est romancée, bien sûr).

Photo en douce...
Pour la petite histoire, le jainisme et le bouddhisme se ressemblent certes, mais ce sont bien deux religions différentes. Non violents, les jains mènent leur vie de sorte à ne blesser aucun animal, aussi petit soit-il. Ils ne sortent pas la nuit, afin de ne pas tuer une bête par mégarde, ils ne consomment pas d’aliment ayant été retiré du sol avec ses racines car il est possible qu’un insecte ait perdu la vie lors de cet arrachement, etc. Comme dans l’hindouisme (religion avec laquelle le jainisme a d’ailleurs de fortes ressemblances), la vie est synonyme d’une souffrance dont on ne se libère qu’au terme du cycle des réincarnations. Pour cela, il convient de faire des bonnes actions, afin d’améliorer son Karma lors des vies suivantes. Le jainisme obéit à un code moral composé de cinq vœux : refus de la violence, refus du mensonge, refus de l’impureté, refus du vol et refus de l’attachement aux biens terrestres. Difficile, me direz-vous. N’est pas Jain qui veut.
Comme à l’entrée de tous les temples, nous retirons nos chaussures, puis nous nous engageons vers un petit sentier qui mène vers un escalier de marbre blanc. On nous conduit sur une grande terrasse à ciel ouvert. C’est là qu’est installé le Jain géant que nous avons aperçu de loin, tout à l’heure.

Dans un coin, un homme fait brûler des bâtons d’encens. Nous sommes seules avec lui, et Jain devant lequel s’étale un grand tapis. L’homme nous enjoint à nous agenouiller pour saluer et prier Jain. Avec le bleu du ciel dans les yeux et le silence blanc qui nous entoure, il est facile de s’évader…
Nous repartons de cet endroit l’esprit reposé. Récupérons nos chaussures et retrouvons le brouhaha de la rue. Attrapons au vol un rickshaw pétaradant. Retour à la maison…

lundi 14 septembre 2009

Amritsar: l'effervescence autour du coeur Sikh

Ce week-end, nous sommes partis à Amritsar, dans la région du Pendjab.
Nous étions 19, à bord de deux minibus loués auprès de l’agence de voyage dans laquelle travaille Mathilde… Une vraie colonie de vacances, en route pour la capitale religieuse de la communauté Sikh.
Avant d’entamer le récit du week-end, je voudrais prendre le temps de rappeler ici les principaux fondements / éléments de la religion Sikh.

Qui ?
Sachez tout d’abord que la communauté Sikh représente environ 20 millions de personne en Inde, soit 2% de la population. Ils sont essentiellement installés dans la région du Pendjab, qui ouvre la route vers la frontière pakistanaise.

Quoi ?
Le sikhisme est né par la personne de Gurû Nanak (15 et 16ème siècle), élevé dans la tradition hindoue. Très jeune, il s’intéresse à l’enseignement de Kabir, saint révéré à la fois par les hindous et par les musulmans. Pour Nanak, l’hindouisme et la religion musulmane ne sont pas antagonistes : il s’agit bien au contraire d’en fusionner les préceptes pour en révéler la richesse. A ceux qui suivent son enseignement, il dit qu’ils ne sont ni des hindous ni des musulmans mais des « Sikh » (disciples).
Attention toutefois à ne pas être trop schématique: le sikhisme va bien au-delà d’un simple mélange entre hindouisme et religion musulmane.

Comment ?

La religion Sikh est strictement monothéiste. Pour ne pas utiliser un nom trop restrictif, le Créateur est appelé « Le Nom Vrai ». Sachez également que chez les Sikhs, le Créateur n’est jamais représenté sous forme humaine : contrairement à l’hindouisme, le sikhisme ne professe pas l’adoration des idoles. De même, il n’y a pas de prophète.
L’enseignement Sikh s’appuie sur le Karma et la Réincarnation : pour éviter de prolonger le cycle des réincarnations, il faut chercher à s’unir avec le Créateur et se libérer de ses vices (alcool, tabac, jeux de hasard) et de son égoïsme. La libération s’obtient à force d’intégrité et d’honnêteté.

Dans la rue, il est assez facile de reconnaître un Sikh :
- le turban : les Sikhs ne coupent jamais leurs cheveux, qui sont un don de Dieu. Ils les cachent sous un long turban enroulé autour de leur tête
- le Kirpan (petit poignard) : au moment du baptême, les Sikh reçoivent un petit poignard dont la lame est à double tranchant, et dont ils ne se sépareront jamais durant leur vie : il est le symbole du combat qu’ils sont prêts à mener pour défendre leur foi.

Un week-end à Amritsar…

Vendredi soir, Delhi. Nous voilà donc installés dans deux minibus, des Tempo plus exactement. Pas de place assise pour tout le monde, deux personnes sont allongées dans le coffre (relativement confortable, par ailleurs) et on tourne à tour de rôle. Seulement 490 Kms séparent Delhi d’Amritsar : il nous faudra pourtant 15h pour y parvenir ! La nuit est agitée : le bus se trémousse sur la route et la pluie réussit parfois à nous arroser malgré les fenêtres. Et en cadeau bonus, le système de climatisation installé au dessus de ma tête fuit : à chaque fois que le chauffeur freine trop brutalement (et ce n’est pas rare …), je reçois un petit jet d’eau glacé sur le crâne… très agréable, comme vous pouvez l’imaginer !

Mathilde, attendant que le Tempo daigne redémarrer après une courte halte...

Samedi en milieu de journée, notre bus se gare enfin dans le parking souterrain de la ville d’Amritsar. Youpi, on est arrivés. Et nous avons de la chance : il fait beau.Le principal intérêt d’Amritsar est le Harmandir Sahib (temple d’or) pour lequel nous avons fait tant de route. On y entre pieds nus, et en se couvrant la tête avec un foulard ou un turban prêté à l’entrée.


C’est dans ce haut lieu spirituel que bat le cœur des Sikhs. Construit en 1601 sous les ordres de Gurû Ajan (successeur de Gurû Nanak), le Temple d’Or n’a rien perdu de sa superbe : il trône au milieu d’un bassin portant le nom d’Amrit Sarovar (Bassin du Nectar), dans lequel de nombreux Sikhs s’adonnent aux ablutions sacrées. Les feuilles d’or qui le recouvrent se reflètent dans l’eau claire du bassin, lui-même entouré de lieux de cultes en marbre blanc. L’endroit est à couper le souffle, et on sent à chaque pas la ferveur qui y règne. Nous entamons un tour du bassin, admirant à chaque angle la vue nouvelle qui nous est offerte du temple.






Vue de nuit...

Ici et là, des hommes plongent dans l’eau et joignent leurs mains en témoignage de leur foi.

Après quelques mètres, nous tombons en arrêt devant un arbre gigantesque. D’après ce que nous avons compris, il s’agit de l’arbre de la fécondité : obéissant au rituel, nous le touchons et faisons un don.
Ce premier tour est rapide et nous n’avons pas le temps d’entrer dans le temple : il nous faut rejoindre le bus afin de nous diriger vers la frontière pakistanaise où, tous les soirs au coucher du soleil, se déroule une cérémonie militaire que nous ne voulons pas louper.
Nous voilà donc à nouveau sur la route poussiéreuse, et bientôt le bus nous arrête au bord des champs, à quelques mètres de la frontière. Pendant près d’une heure, nous patientons devant une grille en plein soleil, au milieu d’une foule (oppressante) d’indiens et de touristes (mais ils sont trèès rares) venus assister au spectacle. Certains soirs, il y a jusqu’à 2500 personnes. Je ne sais pas combien nous sommes aujourd’hui mais c’est impressionnant. Avec Patricio, argentin également échoué à Delhi, nous sortons de la file et attendons sur le côté. Il fait trop chaud et on n’aime pas beaucoup les mouvements de foule qui commencent à prendre forme…
Nous sommes là, au milieu de la route, avec sur notre gauche un premier portail derrière lequel s’amasse une foule gigantesque, et sur notre droite un second portail devant lequel personne n’attend. Tout à coup, ce deuxième portail s’ouvre et les plus rapides sortent de la première file pour s’y ruer. Happés par la foule, nous suivons le mouvement et nous approchons du portail, en essayant de ne pas se perdre…. Mais deux militaires bien armés (et bien enragés, aussi) font violemment irruption et commencent à refermer le portail en feignant de porter des coups à la foule en délire… Ahhhh je traine Patricio par le bras et nous nous traçons un chemin entre les corps agglutinés pour nous éloigner de là… ça ne m’inspire pas tellement.Bref, après une heure de ce traitement, les portails s’ouvrent enfin pour nous laisser passer et nous parvenons jusqu’à des gradins avec vue sur la frontière.


Frontière Inde / Pakistan....

Nous avons perdu tous les autres et ne sommes plus que tous les deux : et là encore, nous nous retrouvons pris au milieu marée humaine… Une musique tout droit sortie du dernier bollywood à succès s’échappe des hauts-parleurs grésillants et, sur la route qui marque la frontière, une bande de jeunes étudiants en uniformes commencent à danser sur un rythme saccadé. Il n’en faut pas plus pour éveiller les instincts patriotiques de la foule. Autour de nous, ça crie, ça siffle, ça se bouscule, ça tape dans ses mains. C’est à la fois grandiose et angoissant.
Un homme à la cinquantaine bien avancée, tout droit dans son uniforme de l’armé, se plante sur la route et hurle dans son micro des mots que nous ne comprenons pas. Comme un seul homme, la foule gronde une réponse qui ne nous apparait pas plus claire. Les mains sur les hanches, l’homme réitère son propos : même réponse de la part de ceux qui nous entourent. Echange patriotique probablement, mots scandés à l’unisson dans une langue inconnue, on sent battre le cœur d’Inde.
Malgré les cris, les bousculades et les corps en sueur, nous sommes bientôt nous aussi rattrapés par la folie du moment et joignons nos voix à la leur…
Les militaires nous offrent ensuite un défilé bien rôdé, avec une succession de levers de jambes et de marches saccadées.
19h. Le spectacle est fini, le soleil s’est couché et tout le monde prend la route du retour. Notre bus nous attend bien sagement sur son terre plein, au milieu des pots d’échappement et des odeurs de fruits brûlés par le soleil. Retour à Amritsar.
La soirée s’annonce plus paisible : allongés sur les bords du bassin, nous admirons le temple d’or qui se découpe dans la nuit.


L’enceinte du temple est une vraie petite ville, qui offre lits et restauration contre rétribution volontaire. Nous nous dirigeons vers les grandes « salles à manger » du temple. Là encore, la foule est au rendez-vous. Tout fonctionne avec des volontaires, nombreux. Au passage, on nous tend une gamelle et un pot en fer, une cuillère. Nous suivons le mouvement et grimpons les escaliers qui s’élancent devant nous. Là encore, nous nous perdons et je me retrouve cette fois seule avec Logaine (péruvienne). Nous attendons dans un long couloir, assises sur le sol marbré, les pieds nus et offertes aux regards curieux des fidèles. Sur je ne sais quel signal, tout le monde se lève et se dirige vers la porte d’entrée de la salle à manger. Je ne marche pas : je suis poussée, portée par la foule. Emportée par une vague humaine, et Logaine entrainée quelques mètres plus loin. Ça pousse, ça pousse, et je sens que tous nos corps glissent vers l’autre côté de la porte. Au passage, une femme tombe et on entend ses couverts qui se répandent sur le sol. De l’autre côté, je retrouve Logaine et on nous presse pour s’asseoir en tailleurs, en rangs et sur toute la longueur. Très vite, l’immense salle est emplie de rangées de gens assis sur le sol les uns à côté des autres. Nous voilà nous aussi sur le sol, faisant face à une rangée de femmes et leurs bébés. Chacun tend sa gamelle tandis que des volontaires passent avec des seaux remplis de Dal (plat souvent à base de lentilles) qu’ils versent à la louche en nous tendant le pain que l’on reçoit avec les deux mains jointes. On mange en quelques minutes, le calme règne presque. Et puis il faut se lever pour laisser la place aux nouveaux arrivants, et se diriger vers les cuisines où l’on abandonne nos couverts à des volontaires chargés de la vaisselle. Le système est impressionnant. Ils doivent être deux cents, peut être plus je ne saurais pas à le dire, à se passer les gamelles, les pots et les cuillères. Ça tourne, ça claque et ça saute dans l’air, les bassines sont remplies de mousse, on lave, on essuie et on place le tout dans d’immenses bacs en plastique où la vaisselle sèche avant d’être à nouveau utilisée.


En sortant des cuisines, nous retrouvons Mathilde, Patricio et Monica et faisons une dernière halte sur les bords du bassin, avant de pénétrer dans le temple d’or. Que dire d’autre à part Wouah. C’est stupéfiant. Magnifique.
Il est tard, des volontaires enturbannés s’affairent dans le temple pour le nettoyer. Nous atterrissons dans une petite pièce toute en or, avec en son cœur des hommes habillés de blanc, qui grimpent sur des échelles pour nettoyer les lustres, passent les dorures au chiffon ou encore époussettent le sol tout en marchant. Et cela en chantant. Un chant qui vient du plus profond de leur foi, une musique douce à entendre dans ce lieu magique. Ces hommes ne se parlent pas, ils chantent en travaillant, tous unis sur la même note et avec une organisation folle. Certains pleurent.
Nous sortons de là avec encore de l’or dans les yeux.
La nuit est bien tombée maintenant et nous rentrons dans nos hôtels respectifs. Nous ne dormons pas tous au même endroit : Logaine et moi rejoignons notre chambre de 7 m2, avec grillages au mur offrant une vue sur les chambres voisines et cafards se baladant sur le sol… Le drap est usé et l’odeur des poubelles qui jalonnent la rue parvient presque jusqu’à nous. « Nunca mas » (plus jamais), elle me dit. Je suis bien d’accord : le lieu est sordide. Mais comme vous pouvez vous en douter au vu de toutes les lignes que je viens d’écrire, ça en valait la peine !
Ci-dessous une petite vidéo... ça se passe à la frontière:

jeudi 10 septembre 2009

Asha Niwas: le retour!

Hier, retour à l’orphelinat. Cette fois, mon coloc (Shaleen) décide de m’accompagner et nous louons un taxi pour l’après midi. Pas besoin d’aller négocier dans la rue, à l’heure dite il nous attend devant la maison et l’expédition commence ! Comme la dernière fois, la misère devient de plus en plus féroce au fur et à mesure que nous sortons de Delhi. Mais aujourd’hui, elle s’étale sous mes yeux à travers les vitres d’une voiture climatisée… Etrange sensation que cette distance palpable.
L’arrivée à l’orphelinat est joyeuse : mêmes visages, mêmes sourires, les fillettes sont un peu intimidées de voir un garçon sortir de la voiture et m’assaillent de questions : C’est qui, Didi (ben oui, « Didi » c’est comme ça qu’on m’appelle ici. Ne me demandez pas pourquoi !) ? Tu le connais ? Il est indien ? Il parle Hindi ? Il a quel âge ?Petit à petit, elles oublient leur timidité et entourent Shaleen qui, fidèle à son habitude de hip-hop boy, plonge sur le sol pour leur apprendre quelques pas de break dance, sous le regard mi-curieux mi-amusé des Sœurs. Cette fois-ci encore, le temps passe très vite. Près de 4h au total pour faire l’aller-retour, sachant que le matin les enfants sont à l’école et que l’on ne vient donc que l’après-midi. Nous avons tout de même le temps de faire quelques bracelets. J’ai apporté quelques fils en plastique scoubidou, en pensant que mes souvenirs d’enfance allaient remonter tout seuls à la surface. Que nenni. Je me retrouve entourée d’une dizaine de fillettes qui suspendent leur souffle en attendant que je leur montre comment fabriquer ces bracelets magiques. Euh, j’ai 5 fils entre les mains et pas moyen d’en faire quelque chose. Tant pis, j’improvise, le résultat est laid mais c’est l’intention qui compte !... Elles s’y mettent à leur tour et en fin d’après midi, j’ai autour du poignet 3 gros bracelets en plastique rose/vert fluo ultra serrés, que j’arbore fièrement en remontant dans le taxi.
Avant le départ, les Sœurs nous invitent dans la cuisine qui m’est maintenant familière. Un masala chai, un gateau blanc sucré qui fond dans la cuillère… jusqu’ici, tout va bien. Elles ajoutent ensuite dans mon assiette quelque chose qui ressemble vaguement à un éclair mais en plus rose et en plus crémeux… Hum…. Je goûte, réprime une grimace. Je jette un coup d’œil à Shaleen qui n’a pas l’air de se porter tellement mieux. Bon, ce serait un affront de refuser alors je fais un effort sur moi-même et quand ça devient vraiment trop difficile, je demande à emporter le reste en prétextant une bonne maladie intestinale la veille. Je sais, le mensonge c’est mal. Mais dans certains cas…







vendredi 4 septembre 2009

Rishikesh: un week-end au vert

Le week-end dernier, nous avons pris la route de Rishikesh.
Rishikesh, c’est tout à la fois une porte d’entrée sur l’Himalaya, le chemin vers la source sacrée du Gange, la capitale mondiale du Yoga et le souvenir des Beatles…
C’est ici en effet que les Beatles ont composé une partie des chansons que l’on peut écouter sur l’Album blanc. Notamment I’m so tired, composé en une nuit par un John Lennon éreinté après trois semaines intenses au sein de l’ashram du Maharishi Mahesh Yogi. Trois semaines sans alcool, sans cigarettes et surtout sans Yoko Ono. La méditation ne le calme pas, elle l’épuise !

http://www.youtube.com/watch?v=NZf9ncOQ2xM&feature=related

Des ashrams, ici, il n’y a que ça. Souvent en bord de Gange, ils accueillent les touristes du monde entier, venus chercher pour quelques jours ou quelques semaines la quiétude dans la méditation et le yoga.

En ce qui nous concerne, point de méditation ni de postures yogi ce week-end. Deux jours, c’est probablement trop court pour apprendre à bien maîtriser cet art.
Mots d’ordre du week-end : repos, musique, lecture et assiettes bien remplies…

Le trajet depuis Delhi est relativement court : seulement 4h de train, effectuées de nuit. Ça nous laisse le temps de dormir un peu…. Samedi, 4h du matin, arrivée à Haridwar. On nous avait prédit un froid de canard à cause des montagnes : finalement, un foulard sur mes manches courtes suffit largement !
Encore une heure de route (en rickshaw cette fois, les cheveux au vent) et nous voici enfin à Rishikesh. La ville est coupée par le fleuve (le Gange), que traverse un pont sur lequel ne sont pas autorisés les véhicules motorisés. L’hôtel que nous avons repéré est de l’autre côté alors le chauffeur nous abandonne là et, nos sacs sur le dos, nous partons à la recherche de la Ganga Guest House. Dix minutes plus tard, nous voilà devant un bâtiment tout gris et tout dégarni. C’est ça, la Ganga Guest House ? Ce mur en construction avec des trous qui font office de fenêtres ? Hummmm. On entre. Tout de même. On ne sait jamais.
Finalement, il faut grimper un petit escalier et longer un couloir pour parvenir à l’hôtel, qui se trouve de l’autre côté. C'est-à-dire non pas côté rue mais côté Gange. C’est relativement propre, pas cher, et il y a une petite terrasse avec vue sur le fleuve. On pose nos affaires.





Il n’est pas encore 8h mais la faim nous tiraille l’estomac. Il ne suffit pas d’être dans un haut lieu de spiritualité pour faire taire nos vils instincts !!
On a repéré sur le chemin une charmante petite cabane en bois sur un étage : le Little Buddha Café. On y va, on y court. Et là, O désespoir, c’est encore fermé… Trop tôt.
Un peu plus loin, on trouve un autre café en terrasse où l’on boit un chai en attendant l’ouverture du Little Buddha. Vue sur le Gange, musique d’ambiance peinarde, soleil qui pointe le bout de son nez…. Que demander de plus ? Des croissants au nutella !!! C’est ce que nous propose le Little Buddha Café quand nous y retournons, une demi-heure plus tard. C’est décidé, nous reviendrons. Et comme nous sommes des femmes d’honneur, nous tiendrons notre promesse tout au long du week-end. En 2 jours, nous avons du faire à peu près 6 ou 7 passages dans cet endroit aussi reposant qu’un ashram. Sur le sol, des tapis et des tables basses entourées de coussins sur lesquels on s’affale en écoutant un mélange de Beatles et de chants traditionnels. L’odeur du chai titille sans cesse nos narines, l’air est calme, la fureur de Delhi si loin…





Bon. Evidemment, nous n’avons quand même pas passé tout le week-end à boire du thé et à se délecter de nutella…. Nous avons également… fait du shopping (Ah ! Culture, quand tu nous tiens !). Et des massages. Mais pas n’importe lesquels : des massages ayurvédiques. Enfin, soi-disant. Je ne sais toujours pas si le moment où la masseuse s’est mise à me taper sur la tête avec ses poings comme si j’étais une vulgaire noix de coco fait traditionnellement partie du massage ayurvédique, ou s’il s’agissait de sa part d’une petite inspiration du moment. Et est ce que ça se passe toujours dans une arrière boutique en terre battue, sur un tapis de quelques millimètres jeté à même le sol ? Avec, comme spectatrice principale, une grosse fourmi digne des bêtes de la jungle, qui tente par tous les moyens d’aider la masseuse de ses petites pattes… Disons que c’était une expérience…
Le reste du temps, nous le passons à parcourir les petites rues, nous arrêtant devant le bric à brac des échoppes…

Temple






Une coulée d'ordures au coeur de la ville...

Dimanche, parce que trop de repos tue le repos, nous avons pris la ferme décision d’aller visiter des temples. Ils sont dans toute la ville, à chaque coin de rue. Certains (Swarg Niwas et Shri Trayanbakshwar) se dressent sur 13 étages. A chaque étage, des petits sanctuaires honorent les dieux hindous. De tout là haut, la vue est superbe : les montagnes, le Gange et le ciel s’étalent sous nos yeux. Malheureusement, photos interdites.

Dimanche soir, après un dernier chai au Little Buddha Café, nous reprenons le chemin d’Haridwar puis de Delhi….