Le temps dure longtemps
Et la vie sûrement
Plus d’un million d’années
Et toujours en été…
Première étape : sur la route avec mes joyeux lurons
Hormis Goa, je n’avais jusqu’à présent vagabondé que sur les terres du nord indien. Mais il y a une dizaine de jours, j’avais rendez-vous au lever du soleil dans les couloirs d’un hôtel de Chennai (Madras). Objectif : retrouver des amis venus passer deux semaines de vacances en Inde.
Alors me voilà, un dimanche à 5h du mat’, attablée devant un capuccino et le regard vacillant sur les vitres de l’aéroport. Pas dormi et un peu froid, mais tenue éveillée par l’excitation de les retrouver tout bientôt. Il est 9h30 quand je débarque à Chennai. La sortie de l’aéroport me rappelle une certaine arrivée à Delhi, 4 mois ½ plus tôt. Une ville inconnue, une atmosphère moite, des rangées de taxis ‘prépaid’… On roule vers l’hôtel et la différence avec Delhi s’impose : la ville semble plus aérée, l’air marin s’infiltre par les fenêtres, et les rues sont bordées de palmiers. Vacances…
Enfin, le taxi me dépose et je me dirige vers la réception. On me donne un numéro de chambre, je grimpe, je frappe, personne… J’imagine. Qu’ils ont raté leur avion. Qu’ils ont oublié de le prendre. Qu’ils ont été détournés. Qu’ils ont atterri ailleurs. Qu’on s’est mal compris. Qu’il existe plusieurs hôtels portant le même nom.
No stress.
Je commence à patienter, je frappe encore, je sonne, ça grogne vaguement à l’intérieur, un pas trainant se dirige vers la porte… tout à coup la porte s’ouvre, Ouf, c’est une Corinne ensommeillée qui apparait, soulagement, grand sourire, je vous passe les embrassades des retrouvailles… Ils sont là tous les trois, installés sur des matelas comme des steaks sur le barbec’ un jour de fête. Après tirage au sort, Fabian a hérité du petit matelas coincé contre un mur. Philou, lui, s’étale de tout son long et ouvre un œil torve quand j’entre dans la pièce. Il m’accueille d’un ‘Mon poissonn’ frisant les aigus. Je me fais une petite place sur un bout de matelas et on se rendort tous pour quelques heures. Ma nuit commence et la leur est à peine entamée : ils ne sont en Inde que depuis 2 ou 3 heures.
A 12h, le téléphone sonne. Chacun se pousse du coude pour que l’autre décroche. Finalement, c’est Philou qui s’y colle. En raccrochant, il n’est pas sûr d’avoir tout compris mais il semblerait que le chauffeur qui va nous accompagner durant les prochains jours vient d’arriver. Pendant que mes chers compatriotes se préparent en douceur, je m’accoude au balcon et, enveloppée par un rayon de soleil, je dévore la moitié d’un Chaussé aux moines sorti comme par magie de la valise de Corinne. Ça sent bon le fromage ramolli et c’est joli comme une publicité. O bonheur, je fonds…
13h. L’heure du départ a sonné et il flotte dans l’air un petit parfum d’insouciance. Je grimpe dans la voiture sans bien savoir où nous allons. Philou a tout prévu, nous nous laissons guider.
Avec eux, le voyage durera 4 jours. De ce périple dans le Tamil Nadu, point d’images à vous offrir. Non pas que mes trois mousquetaires ne soient pas photogéniques ou qu’ils veuillent conserver l’anonymat, mais mon appareil photo a choisi l’Inde pour s’éteindre (en quoi sera-t-il réincarné ? les paris sont ouverts…) et je n’ai pas encore récupéré les photos prises par ma fine équipe.
4 jours, 5 villes. Et toujours une atmosphère très ‘spirituelle’ : le sud est LA région des temples. De même que les paysages y sont d’un vert qui tranche nettement avec la sécheresse plus prononcée du nord, les temples ont poussé dans ce coin du monde comme des champignons par temps humide. Et pas n’importe quels temples : des édifices immenses et d’une ambitieuse majesté, à l’écorce gravée et sculptée, aux dieux colorés et dont on sent plus encore qu’ailleurs la force du règne. Les ‘stars’ de la région, ce sont Vishnu et Shiva, représentés aussi bien sous leurs formes divines que par leurs divers avatars. Et non, ne pensez pas que j’utilise à travers le terme d’avatar. En sanskrit, le terme signifie ‘descente’ et c’est ainsi que l’on nomme dans la religion hindouiste les incarnations terrestres des dieux.
Premier arrêt : Mamallapuram
Petite station balnéaire à une heure de route de Chennai. Les pieds dans le sable, on découvre une plage longée de guest houses et de restaurants d’où s’échappent les odeurs de la mer. Du poisson. Des crevettes. Ça faisait longtemps. Et on a l’embarras du choix. Mais Mamallapuram n’est pas seulement un paradis pour mon estomac affamé, c’est également un village très connu pour ses nombreux temples. Le ‘Shore Temple’, notamment, est remarquable. Construit dans le pur style dravidien (terme issu du sanskrit et désignant à l’origine les peuples occupant le sud de l’Inde), il est l’un des plus anciens temples de la région et, depuis le 8ème siècle, regarde la mer depuis son banc de sable. Là où il n’y a plus aujourd’hui qu’un temple, il semblerait qu’il y en ait eu 7 à l’origine. Les 6 autres auraient été submergés au 13ème siècle par un tsunami. Celui qui reste n’a, quant à lui, pas été totalement épargné par les forces marines : le tsunami de 2004 en a fortement abimé les constructions. Tout comme la ville, également ravagée par le tsunami. Depuis, les hôtels et restaurants ont été, comme dans beaucoup d’autres endroits, reconstruits à l’identique (ou presque).
Si vos pas vous mènent un jour dans ce charmant petit village, sachez que l’on y trouve aussi des sculptures : têtes de buddhas, représentations de Vishnu, tout est possible, ici c’est le paradis de la pierre !! Philou et Corinne l’ont d’ailleurs bien compris et nous avons arpenté les allées des diverses échoppes à la recherche de LA sculpture qui ferait tilt dans leur cœur. Et il n’y en pas eu qu’une.
Second arrêt : Pondichery.
A Pondichery, les rues portent des noms français. Et certaines guest houses aussi. Et tiens, ne serait-ce pas là une boulangerie ? Ma parole, on m’a fait prendre l’avion du retour et on ne m’a rien dit…
Pondichery, ancienne colonie française. Et ville où il a l’air de faire bon vivre. La mer en bordure, des rues dans lesquelles on se repère, des trottoirs sur lesquels ont prend plaisir à marcher. Si elle est encore trop bruyante au goût des nouveaux arrivés, quant à moi la ville me semble être un petit havre de paix… Il est difficile en Inde de trouver un compromis entre les grandes villes grouillantes et les petits villages bercés de calme. A Pondichery, le compromis existe ! Ville dynamique, peuplée, mais qui semble plus ‘organisée’. Ici, on peut se déplacer un pieds sans risquer à chaque pas de tomber dans un trou ou de rebondir entre la carrosserie de deux voitures… Enfin, une ville à vivre !
Troisième arrêt : Chidambaram
Un nom magique… et qui me fait rêver depuis plusieurs jours. O Rage O Déception. Chidambaram, je le dis tout net, c’est pas joli. En tout cas, vu de mon œil. C’est grouillant mais sans charme. La ville me parait sombre, je n’y trouve pas les jolies couleurs de l’Inde que j’aime habituellement m’accrocher aux yeux.
Chidambaram, ça vaut quand même le détour pour une raison : son temple. Appelé en toute simplicité ‘Sabhanayaka Nataraja Temple’. Et là, j’avoue, c’est à couper le souffle. C’est immense, rien à voir avec les temples que j’ai visité jusque là. Il n’a pas, je trouve, la gaieté spontané de ceux que j’ai déjà arpentés. Il y a quelque chose de plus ardu dans son accueil, de plus ‘distant’. Mais la foi y est agrippée.
Le temple est immense, sombre, on y chemine en longeant de grandes arcades. 18h, c’est l’heure de la Puja et c’est pour ça que nous sommes là. Et on ne regrette pas d’être restés pour y assister. C’est un vrai spectacle. Shiva est porté par les fidèles, la flamme des bougies fait vaciller l’atmosphère, les prières sont scandées dans un chant qui nous emporte…
C’est une puja que nous n’oublierons pas.
Quatrième arrêt : Kumbakonam
Un dédale de ruelles, une ville un peu plus sympathique, des bains dans lesquels les fidèles font leurs ablutions, des temples disséminés dans la ville…
On passe une matinée à déambuler d’un endroit à l’autre, savourant la beauté des temples et leur calme. Il fait chaud, très chaud. Et c’est agréable, toute cette sérénité.
Cinquième arrêt : Thanjavur
Il pleut des cordes quand nous arrivons. Dans le sud, la mousson n’a pas encore dit son dernier mot.
Nous nous rendons directement au Temple de Brihadishwara, ouvert sur le ciel et que nous visitons sous une légère pluie, ma foi fort agréable. Le sol est couvert de petites flaques dans lesquelles nous pataugeons, pieds nus. Et il me semble que sous la lumière du soleil mêlée à celle de la pluie, ce Temple est encore plus beau qu’il ne doit l’être habituellement.
Le lendemain matin, visite du Palais Royal.
Vers 12h, Philou, Corinne et Fabian s’apprêtent à remonter en voiture pour poursuivre leurs aventures, plus au sud. En ce qui me concerne, c’est un bus que je vais prendre. Retour à Chidambaram en fin de journée, car Mathilde arrive le lendemain matin et nous avons rendez-vous à l’aube, là encore dans les couloirs d’un hôtel…
C’est donc dans une gare routière que nos routes se séparent. Je leur fais coucou de la main, dommage, je n’ai pas de mouchoir blanc…
Avec Mathilde, nous projetons de nous rendre le lendemain dans un temple mystérieux et préservé du tourisme, dont aucun guide ne fait mention. Dans ce temple, il suffit de donner son empreinte digitale pour qu’un vieux sage sorte de ses tiroirs une feuille de palmier sur laquelle a été rédigé pour nous un texte, il y a 2000 ans de cela. Et ce texte est censé contenir toute notre vie… Suite au prochain épisode !
mercredi 9 décembre 2009
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ooooh... De ces endroits que je connais et qui continuent de mettre en appêtit mon imaginaire. Merci ma Céline pour ce récit et à très bientôt autour de nos communes aventures !
RépondreSupprimerA propos de Mamallapuram, je souhaite apporter un rectificatif.
RépondreSupprimerJ'y vais régulièrement et j'y suis allé en janvier 2005, deux semaines après le tsunami.
Les restaurants de la plage n'ont pas souffert et ont protégé les habitations des pêcheurs.
Seuls les murets des terrasses de ces restaurants ont été balayés, ainsi que quelques rares huttes.
La mer est montée jusqu'à la base du Temple du Rivage.
Le village de pêcheurs n'a eu à déplorer qu'un seul mort : un garçon de 10 ans qui a été frappé par une embarcation projetée par la mer.
Quelques touristes indiens sont morts noyés.
Le bilan du tsunami, à Mamallapuram, est minime, comparé aux 8000 victimes du Tamil Nadu, concentrées essentiellement dans la région de Nagapattinam.